UNE PERFORMANCE VERNACULAIRE À L'ÉPREUVE DE SON MILIEU est le titre de la recherche menée sur deux ans lors de la formation ESSAIS que j'ai faite au Centre National de Danse Contemporaine à Angers (2011-2013) alors sous la direction d'Emmanuelle Huynh.

ESSAIS avait le statut de MASTER et nous avons travaillé en partenariat avec l'Université Paris 8 et l'École des Beaux Arts d'Angers.

Parce que nous étions sous le modèle MASTER, pratiquant la recherche écrite / théorique / analytique, on disait qu'on écrivait notre MÉMOIRE.
Je n'aimais pas ce terme : simplement parce qu'il semblait déjà sceller ces pensées, qui avaient le droit d'être jetées sans se soucier de leur pérennité. Réinjecter systématiquement de l'Histoire et de la Mémoire aux choses en train de se faire m'agace régulièrement.

Ce mot n'a finalement pas eu tant d'emprise sur les formes qui ont émergées et avec lesquelles on a réussi à prendre du plaisir.
Et quand quelqu'un•e me demande "tu peux m'envoyer ton MÉMOIRE s'il te plaît ?"
En général je réponds "ouai pas de problème, file-moi ton mail".

Ici, j'y ai mis quelques extraits, des textes qui résonnent toujours pour moi aujourd'hui. Je mets également l'INTRODUCTION générale ainsi que le sommaire, pour un peu de clarté.

DONC OUI, SI L'ENVIE VOUS PREND DE VOULOIR LA VERSION INTÉGRALE EN PDF ===> annelise.legac@gmail.com
JE PEUX MÊME FAIRE FAIRE UN EXEMPLAIRE PAPIER MOYENNANT QUELQUES €€Ÿ$$ POUR ME REMBOURSER L'ENCRE DE L'IMPRIMANTE.

jongle_dossier
intro

Comme un hommage à Filliou, je vais prendre le parti de célébrer dores et déjà mon esprit d’escalier quant à la rédaction de ce dossier. Le fait d’écrire, noter, dessiner, archiver, analyser, m’amène toujours plus à percevoir ce qui n’est PAS dans cette production et mériterait d’y être.
C’EST BIEN.
Car les formes restent ouvertes et ne s’achèvent pas si facilement. J’aimerais vous dire que ce dossier est profondément INACHEVÉ, mais que j’y ai donné un POINT TEMPORAIRE, afin de respecter la date butoir de son rendu. Cependant, il se loge dans un classeur avec intercalaires, je/vous/nous pourrons en profiter pour jouer de sa modularité.

Je vous présente donc ici ce que l’on appellerait un «MÉMOIRE». Je me permets de détourner le terme sans pour autant le renier. Car ce dossier, produit au fil des deux années passées dans la formation ESSAIS, se charge effectivement d’une mémoire non-exhaustive que je tente de tracer dans ces pages. J’emploie le terme «dossier», à l’intérieur duquel je veux y glisser de multiples documents. Ces termes renvoient au champ lexical informatique, mais sont en premier lieu des terminologies de bureaucrates. Comme on pourrait aussi les appeler des grattes-papier.

JE VIENS DE RANGER MES NOTES.

Je suis partie de mes expériences au CNDC. Aussi nombreuses soient-elles, j’ai vite compris que je ne pourrai chercher plus loin que ce qu’il s’est passé ici/grâce à Angers.
OBSERVATION & PARTICIPATION ==> les deux postures se complètent et permettent des allers-retour entre analyse d’une pratique et pratique d’une analyse. Je ne mettrai JAMAIS ces termes en opposition, JE VEUX TOUJOURS LES GARDER L’UN POUR L’AUTRE.
En arrivant, ma question brûlante était «QUEL ENTRAÎNEMENT POUR QUELLE PERFORMANCE ?» Je pensais que ce serait celle de ce dossier... Venant des arts visuels, et du champ de la performance, la problématique de l’entraînement et de la répétition se traite difficilement. En pédagogie, les profs de performance posent bien évidemment la question afin d’assurer leur propre survie en école d’art au contacts des étudiants. Mais sans l’espace de l’école et sans technique à part entière, comment pratique-t-on la performance ?

(Je suis encore à l’école mais j’assure mes arrières...)

Depuis deux ans, je me trouve précisément à un endroit où performance et technique ne s’ignorent pas, au contraire, elles s’inventent ensemble. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je me suis lancée DANS le CNDC. En m’engageant dans les workshops, l’écriture, l’observation et les discussions, j’ai trouvé des possibles alliances, différents moyens de travailler un geste comme la démarcation d’un temps qui produit une forme. Alors si technique il me faudra travailler toujours, c’est bien cette MANIPULATION DU TEMPS, dans laquelle s’inscrit une performance.
Je ne vais pas me lancer trop loin dans ce qu’est une performance... cela n’apporterait sûrement pas grand chose au débat.

Mais par contre, je vais poser des questions (souvent très pragmatiques), sur les modes de fabrication d’une performance, sur le COMMENT plutôt que le POURQUOI...


-- DE QUOI AI-JE BESOIN ?
-- DE QUI AI-JE BESOIN ?
-- DE COMBIEN AI-JE BESOIN ?

Ces trois questions doivent revenir au cours de la création... Je ne me laisse plus les oublier. Les reconvoquer permet de revoir ce qui est NÉCESSAIRE au projet. Elles n’empêchent aucune dérive (inévitable dans mon cas), justement ! Elles replacent les enjeux, ceux qui étaient là au départ et qui étaient les raisons de faire naître un travail.

Repositionner le «COMMENT JE FAIS» condense des problématiques essentielles, d’ordre, économique, humain, politique, physique, expérimental. Parce que je crois profondément à la PUISSANCE DE L’EXPÉRIENCE, savoir la regarder puis la digérer devient tout aussi puissant. Ce qui m’intéresse en pédagogie (disons expérimentale), c’est le principe de MISE EN SITUATION. Une situation est posée, il faut la vivre, la démêler, s’y inscrire. Pour cela, le pédagogue réserve son savoir, et se fait témoin des solutions que trouvent les néophytes (au sens grec de «nouvelle plante»).

J’ai plutôt tendance à renouveler éternellement mon statut de néophyte, ce qui ne fait pas de moi une plante naissante, mais une plante nouvelle à un contexte. Et les contextes, je vais les chercher irrésistiblement.
Durant l’été 2012, j’ai pu partir au Canada travailler avec un groupe de filles (les MUDGIRLS) qui construisent des maisons en matériaux naturels, dans les forêts des îles de la baie de Vancouver. Il s’agissait de reprendre des techniques ancestrales d’architecture vernaculaire, et les adapter aux conditions de la région. Les filles n’ont jamais prononcé le mot vernaculaire, elles usaient du mot «local». Ce qui a trait à un lieu, un endroit particulier. Effectivement, je me suis lancée dans une pratique du LOCAL, une existence basée sur la matière que je trouve sur place.

En rentrant en France, une drôle de sensation... Nous vivons dans l’excès total, et nous allons le chercher loin. Je ne tiendrai certainement pas un énième discours barbant sur la sur-consommation de nos sociétés... Mais, la claque du retour était forte. Ai-je moi aussi besoin de tout «ça» ? Vivre dans une relative précarité avait supprimé quelques besoins (qui n’en étaient pas) et je réduisais les quantités pour mieux savoir ce qui m’était NÉCESSAIRE. Je vous passe les récits domestiques, sur «comment les mudgirls ont changé ma vie», mais je vais précisément extrapoler sur «comment se servir de la matière locale pour envisager un geste, une performance vernaculaire ?»
Je pose ici la question d’une économie de la performance, en prenant comme terreau principal son contexte de réalisation.
L’étymologie du mot vernaculaire vient du latin «vernaculus» qui signifie «ce qui est propre aux esclaves de la maison». Il n’est cependant employé que très tardivement (XVIIIème siècles) pour parler d’une culture propre à un pays ou une région. C’est un terme relativement simple dans les définitions qui en sont proposées mais complexe dans ses usages. En effet, les deux applications phares d’un système vernaculaire, se retrouvent dans l’architecture et le langage. Deux domaines en perpétuelle évolution depuis des millénaires mais dont les origines sont régulièrement convoquées au cours de l’Histoire et ses époques.

Je citerai un extrait d’un article de Silvio Guindani, sur l’architecture vernaculaire, publié dans le livre Lieux d’Europe1 :

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« Toute analyse de l’architecture vernaculaire peut donc se fonder sur une approche conceptuelle caractérisée par trois pôles de référence à partir desquels on peut situer méthodiquement chaque objet :

-- la dimension humaine : l’homme inscrit dans l’environnement construit ses particularités de nature socioéconomique, culturelle et historique ;
-- le milieu naturel et paysager détermine la forme architecturale par le biais des données environnementales comme le climat, la topographie, la morphologie, etc. ;
-- les matériaux endogènes locaux (pierre, bois, terre) façonnent la construction vernaculaire et déterminent les techniques particulières de mise en œuvre de la forme bâtie.»**

Si on s’amuse à remplacer le mot «architecture» par «performance», alors ces trois critères d’analyse décrits par Silvio Guindani, peuvent tout à fait jouer comme les fondements de ma question sur l’hypothèse d’un geste et d’une performance vernaculaire.

Je ne vais pas plonger dans une analyse anthropologique de la notion de vernaculaire, mais je vais partir de sa définition pour tenter une proposition de recherche déplacée dans mon contexte de création, de vie et de travail. Je n’oserai dire que mes projets parviennent à formaliser une démarche purement vernaculaire... Mais par la réflexion que je pose ici, j’aimerais soulever les potentialités «naturelles» et humaines de ces terrains et discuter de ce geste qui les façonnent. Je m’appuie sur des pratiques et concepts qui tentent de proposer des manières de faire / de penser et que j’ai traversé via les projets et workshops suivis et développés au CNDC. Dans ce dossier, j’en ai fait une sélection, j’ai mis en regard des expériences qui peuvent paraître lointaines mais se rejoignent autour de cette question. Volontairement, je ferai se confronter les formats et registres d’écriture, les objets servant à communiquer, à donner à voir et comprendre. Je n’établirai aucune hiérarchie entre un texte et un dessin par exemple. Ces formes se côtoient, et dessinent les unes par rapport aux autres, mon mode de pensée et ses applications. Elles tentent une restitution, une transcription, une traduction, une interprétation, une formalisation, une version des faits. Ce processus permet une relance de la matière en travail. Potentiellement, ce dossier est mon outil de travail, il ne fige pas les idées, mais tente de les mettre en «bouillon». J’opte pour une forme aussi décomplexée que possible des systèmes et registres d’écriture, afin de proposer simplement et directement au lecteur des réflexions à ruminer ensemble.

Des pages blanches lui sont offertes pour qu’il y glisse ses remarques, notations, conseils, jugements, références... Le dossier en serait précieusement complété.

lire-artvivant

===> expliquer la structure du mémoire.

Elle se divise en trois parties, à l’intérieur desquelles des sous-parties développent des points et contextes précis.


1 ===> APPRENDRE EN FAISANT

2 ===> ÉLÉVATION OU MONDE PARALLÈLE

3 ===> POLITIQUE DU LOCAL***

  • Chaque partie est introduite par un texte expliquant à quel endroit je me place pour parler de la problématique.

  • Les sous-parties sont exposées en détaillant les textes qu’elles contiennent. Un extrait d’un livre-référence précède les textes. J’ai choisi de citer des auteurs, plutôt que de les commenter. J’ai préféré les mettre en regard de mes recherches, comme autant de tremplins permettant d’activer ma réflexion.

  • Un «index d’atelier» est placé à la fin du dossier. Il compile une sélection de mes propres entraînements/pratiques ou ceux d’artistes rencontré-e-s lors de workshops.
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filliou